Viva villa ! Un festival de découvertes à la Villa Méditerranée jusqu’au 7 octobre
Ouvert en grandes pompes le 29 septembre, le festival des résidences d’artistes ¡ Viva Villa ! 3ème édition, élaboré sous le commissariat de Cécile Debray et Federico Nicolao propose de découvrir gratuitement de 10h à 22h, jusqu’au 7 octobre à la Villa Méditerranée, une cinquantaine d’artistes issus de la promotion 2017/18 venus de trois grandes institutions françaises à l’étranger – la Casa de Velázquez, la Villa Kujoyama et la Villa Médicis.
Ce n’est pas un hasard si cette édition s’installe à Marseille, carrefour de la Méditerranée. En questionnant la notion de frontière et des limites tant du point de vue des arts (où sont interrogées la sophistication technologique et l’ouverture des écritures artistiques) que de la géopolitique (avec ses problématiques des déplacements migratoires, des frontières invisibles, ses crises politiques et identitaires), cette exposition dessine un parcours où les stigmates laissés par le temps côtoient la quotidien de l’Homo Urbanus ou encore les architectures futures.
Cette exposition collective est parsemée de performances d’artistes et de rencontres avec les résidents toute la durée de ce festival mêlant les disciplines telles que le dessin, la vidéo, la photographie, des installations, la peinture, la musique, le cinéma. De nombreuses références sont faites aux artistes néo-dadas, undergrounds ou encore postmodernes des années 70 et 80 à l’image de Alvin Curran ou encore de Gordon Matta-Clark, deux grandes figures des seventies. Parmi les réalisations présentées, plusieurs projets ont attiré notre attention : celui d’Ila Bêka et Louise Lemoine, celui de Juan Arroyo et celui de Marc Leschelier. Ces deux derniers ont été pensionnaires de la Villa Médicis.
Artistes, vidéastes, producteurs et éditeurs, Ila Bêka et Louise Lemoine, résidents de la Villa Kujoyama, expérimentent de nouvelles formes narratives et cinématographiques en relation avec l’architecture contemporaine et le monde urbain. Avec HOMO URBANUS, journal de marcheurs urbain, ils explorent les villes de plusieurs pays (Bogota, Seoul, Naples, Rabat, Saint Petersbourg, Kyoto et Tokyo),en marchant et récoltant des impressions, captant une vibration, collectionnant des choses vues au détour d’une rue, à un carrefour, en haut d’un building. Parler d’une ville au présent, dans la simplicité de son quotidien. « Ecouter sa rumeur, son bruit intérieur. Se caler sur son rythme. Être à l’affût, dans un perpétuel étonnement envers l’imagination et la créativité que les hommes ont développées pour trouver le moyen de vivre ensemble.» Au travers d’une découverte intuitive des villes traversées, au hasard des leurs promenades urbaines, les deux artistes tentent de saisir les règles non dites d’une société, ces règles silencieuses propres à une ville, qui demeurent encore en dépit de la mondialisation environnante. Ce projet cinématographique passionnant a donné lieu à la réalisation de 5 films, mis en regard, d’une durée d’une heure chacun, à découvrir dans leur entièreté ou à picorer pendant l’exposition.
Juan Arroyo, compositeur péruvien aux multiples récompenses, passionné d’électronique, a imaginé des instruments pouvant interpréter sans présence humaine une composition musicale grâce à un procédé électronique tenu secret par son inventeur. En travaillant sur l’automatisation, il offre à découvrir un projet ludique et étonnant, subjuguant, avec ses instruments hybrides (grosse caisse, violoncelle, guitare ou encore tambourin) qui jouent tous seuls. Au-delà de la prouesse technologique, Juan interroge notre humanité. L’absence du musicien derrière ses instruments crée un vide et un manque chez le spectateur et nous questionne : qu’est-ce que serait le monde sans être humain ? En repoussant les limites de la technologie, il montre en nous faisant vivre l’expérience de Listen to me que le robot ne peut remplacer l’humain. Il doit rester un instrument et ce combat -qui n’est en rien donquichottesque- est aujourd’hui plus que nécessaire avec l’invasion des technologies qui dans notre quotidien nous coupent des autres et de notre humanité profonde. Cette œuvre contestataire nous a séduits tant elle se révèle d’actualité.
Marc Leschelier , architecte et enseignant à l’École d’Architecture Paris-Malaquais et fondateur de la Unbuilt Archive, propose avec Synthetic Construction et Circus Aedificare une réflexion sur les matériaux à la base de toute construction architecturale, des matériaux du futur à fabriquer qui au-delà de leurs propriétés (densité, résistance…) consubstantielles à la construction d’immeubles peuvent redonner une liberté à l’architecture. Cette dernière est conçue pour être utile et optimiser les espaces mais ne peut-elle être autre ? Ses « œuvres » à priori étranges mêlent l’informe à la matière et se dégage d’elles une impression de no man’s land désertique où les ruines sont les reliques d’un temps oublié. Ce sont par ailleurs des ruines romaines qui lui ont inspiré son projet architectural. Passionné par l’actionnisme viennois, le jeune homme ne se définit pas comme un artiste : il est architecte et ce qui le motive dans sa recherche se trouve dans le principe d’accumulation de matériaux aux textures et à la plasticité disparates. Ce que peut créer la rencontre entre une matière dure aux lignes pures et une matière informe. Ce que cette dernière peut offrir en termes de possibilités de création architecturale libre. Un projet fort excitant que nous vous recommandons.
Cette exposition soutenue par la Région Sud PACA pour sa première édition hors Paris recèle bien entendu bien d’autres découvertes, à l’image des photographies post apocalyptiques prises dans des lieux dévastés de David de Beyter, la fresque géante de Juliette Le Roux ou encore le concert de perceuses de Clément Carat avec ses verres symphoniques. DVDM
Photo de Une: Vue de la Villa Méditerranée – copyright Franck Pennant
A noter :
Dans le cadre de la programmation ¡ Viva Villa ! et de la Carte Blanche Villa Médicis, le vidéaste Simon Rouby – ancien pensionnaire Villa Médicis – présentera avec Keziah Jones le Vendredi 5 Octobre à 20h15 à la Villa Méditerranée « Almajir », performance transdisciplinaire imaginée en collaboration avec Keziah Jones, Native Maqari (performer) et Qudus Onikeku (danse).
Plus d’infos : https://vivavilla.info/
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