Une nouvelle soirée riche en découverte à l’Espace Léo Ferré
Loin de tous tapages médiatiques, découvrir trois artistes de tout premier ordre Thierry Herbin, sculpteur, René Herbin, compositeur et grand-oncle du précédent, et Elizabeth Herbin, pianiste et fille du compositeur lors d’une exposition concert à l’Espace Léo Ferré est une expérience grisante et un évènement !
Le Toursky et son directeur n’ont pas leur pareil dans la cité phocéenne pour nous faire partager de belles découvertes artistiques.
La soirée a débuté avec Thierry Herbin qui présentait quelques-unes de ses œuvres, trop peu hélas : deux grandes statues bleus et rouges suivies d’une dizaine de statuettes se ressemblant toutes plus ou moins.
Parmi ces œuvres se démarquait le grand Poisson bleu : il s’agit d’une sorte de triton présenté, de façon originale, debout et dans un style proche de l’art brut, et dont le bleu puissant rappelle celui inventé par Yves Klein, le IKB.
Mais au final, il faut bien l’avouer, cette exposition trouve avant tout sa pertinence comme introduction au concert car c’est bien de celui-ci que provenait tout l’intérêt et plus précisément de son programme : des œuvres de René Herbin (1911-1953), compositeur français encore quasiment inconnu ; à ce jour seul son quatuor pour piano a été enregistré chez le courageux label Gallo qui reçut d’ailleurs un accueil très favorable de la critique internationale.
Il faut dire que l’enregistrement est de toute beauté et on tient là un des chefs d’œuvre de la musique de chambre française à découvrir de toute urgence ! Les américains ont même comparé les œuvres musicales de ce compositeur à celles de Chostakovitch. C’est pour dire !
Lors du concert, on a pu entendre deux œuvres de René Herbin : l‘Album d’images pour piano, composé en 1940 alors qu’il est en captivité dans un camp de la mort nazi, et trois pièces pour clarinette et piano, le tout interprété avec justesse et passion par la pianiste Elizabeth Herbin au jeu raffiné et le clarinettiste Olivier Pierre Vergnaud. Des cinq années de captivité, il écrit dans des situations précaires de nombreuses œuvres dont la sonate pour violon et piano ou Deirdre des douleurs pour orchestre de chambre… Ces œuvres étaient associées à la Sonate pour piano et clarinette de Poulenc.
Les deux interprètes y déploient une belle énergie et parviennent à nous offrir toutes les beautés de l’œuvre de Francis Poulenc !
Pour avoir une idée plus précise des œuvres et du style de René Herbin, il faudra attendre d’avoir écouter d’autres œuvres, ce qui pourrait mettre lumière un style plus personnel : c’est pour cette raison qu’on espère de tout cœur que la combat de sa fille, Elizabeth Herbin, pour le faire connaître et enregister son oeuvre, aboutira. À quand un enregistrement du concerto pour piano et orchestre de René Herbin écrit en 1952 créé à titre posthume par Vlado Perlemuter en 1956 ?
Elisabeth Herbin, l’une des grandes pianistes françaises du moment en serait sans aucun doute l’interprète idéale !
On souhaite la retrouver au Toursky pour un autre concert passionnant autour d’œuvres de son père ou au Festival des Musiques interdites dirigées par Michel Pastor dans la cité phocéenne.
La soirée s’est achevée sur un échange entre interprètes et spectateurs sur la vie et la musique de René Herbin : un moment riche en émotions à propos d’une vie mouvementée et d’une prometteuse carrière stoppée le 1er septembre 1953 par un tragique accident d’avion à l’âge de 42 ans avec l’illustre violoniste Jacques Thibaut dans les Alpes de Hautes Provence ironie du sort non loin du crash de la Germanwings du 24 mars dernier.
Une belle leçon d’amour offerte par une fille orpheline de son père à l’âge d’un an pour la réhabilitation de l’œuvre de son père !
Charles Romano
Prochain rendez vous à ne pas rater au Théâtre Toursky :
Moi, Diane Fossey le 20 novembre, Nuit du piano le 27 novembre avec Nicolas Bourdoncle : www.toursky.fr
Pour en savoir plus sur René Herbin :
www.reneherbin.ouvaton.org