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Avignon off 2018: Varhung par le Tjimur Dance Theatre

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Chorégraphie : Baru Madiljin

Avec  Tzu-En MENG, Ching-Hao YANG et Ljaucu TAPURAKAC

Durée : 1h/Dès 6 ans

 Cette nouvelle pièce chorégraphique de Baru met en scène un temps fort dans la vie de la tribu Païwan : celui de la cueillette, du séchage et de l’épluchage par strate du gingembre coquille ou fleur du paradis. Ce rituel rythme la vie de cette communauté, avec ses fêtes et ivresses nocturnes données au retour de la cueillette, dans les cabanes des ouvriers, au cœur des forêts.

Avec ses mots éructés en païwanais – quoi, comment ?- scandant les pas de danse, psalmodies donnant le La au mouvement chorégraphié, au sein duquel se dessinent quelques pas de 4 (référence à la précédente création de la compagnie qui avait séduit le public l’an passé), la création proposée offre à vivre et ressentir les traditions d’un peuple, également son âme.

 Les danseurs font preuve d’une énergie et vitalité étourdissantes, où la danse tribale s’approche d’une transe extatique qui rappelle l’époque ancienne des bacchanales dionysiaques où le vin coulait à flot et les danses folles battaient leur plein, voire pour l’aspect chanté, le retour des esclaves noirs à la tombée du soir dans l’Amérique des champs de coton.

Une ivresse extatique envahit le corps des danseurs qui cette fois ci ne sont que trois,  deux hommes (Ljaucu TAPURAKAC, Ching-Hao YANG) et une femme (Tzu-En MENG) ou plutôt, une femme et deux hommes. Ancrés au sol, comme mus par une puissance quasi divine, mystique, ils emportent le public dans un tourbillon d’émotions avec leurs pas de danse allant crescendo jusqu’à l’épuisement du corps et des sens.

La sueur perle le long de leur costume de scène, l’eau coulant sur leur nuque rougie par l’effort des portées, des sauts erratiques, des battements de pieds et de cœurs synchronisés, avec une gestuelle d’une précision étonnante (notamment la scène de la cueillette) : la répétition fait ici la force du mouvement et le rend hypnotique.

Il est néanmoins regrettable que certaines ruptures soient trop brutales, notamment quand les danseurs au bord de l’épuisement se laissent tomber pour entamer un chant puissant et envoutant avant de reprendre leur transe en solo, duo et trio, suivie immédiatement d’un pas de deux amoureux : ce dernier est amené un peu trop vite, après une scène d’ivresse sur-jouée.

Sur fond d’une « chanson de la cabane forestière » chantée en mandarin (une étrangeté de choix qui nous questionne : peut-être est -ce pour qu’elle soit comprise d’un plus large public sinophile ?) qui raconte l’histoire d’amour malheureuse d’un ouvrier aborigène dont la femme est tombée amoureuse d’un autre, -douleur d’un homme exprimée en toute simplicité-, les deux plus jeunes danseurs de la troupe, le longiligne Ching Hao et la jeune femme offrent un joli moment de répit avec cette danse amoureuse où se mêle tristesse et solitude d’un amour perdu.

Car cette création et la reprise de ce chant racontent la vie de ces hommes qui dans leurs baraques en pleine forêt peuvent passer des mois et mois loin de leur famille pour ramasser le gingembre coquille et se regroupent le soir, guitare en main, chantant leur chanson, pour passer le temps et oublier (noyer) leur désespoir, joies et chagrins. Une tradition de ces jeunes aborigènes transmise de générations en générations.

Nous pouvons saluer la performance physique et vocale des trois artistes sur scène qui se donnent sans compter avec une énergie folle. Mention spéciale pour le jeune Ching Hao dont la prestation est remarquable, sa danse est plus fluide et aérienne que celle de Ljaucu, plutôt massif avec des mouvements bien plus ancrés au sol et ramassés : Ching Hao au fur et à mesure du spectacle donne la pleine puissance de son talent et impose le rythme à ses compagnons.

Standing ovation du public mérité pour cette création qui fait salle comble depuis le début du festival. Diane Vandermolina

Crédit Photo: Michel Cavalca

Rmt News Int • 25 juillet 2018


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