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Retour sur le spectacle Humaines ! au Théâtre Marie Jeanne

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Mise en scène Patrick Rabier avec Nicolas Pecullo (Olga), Martine Chenoz (Georgie) et Gianni Lentini (Zorra)/Durée : 1h30

Un cabaret grotesque contre les fascismes

Humaines, si humaines ! Au théâtre Marie Jeanne, ce 13 octobre dernier, trois femmes à l’allure étrange se dévoilent à notre oreille et se livrent à notre regard, sous leurs fards ourlés et leurs habits éclatants.

Après trente ans de tour du monde, Georgie, mère maquerelle et tenancière de cabaret, revient un soir au Cabaret Waldoff. L’établissement qui illumina en son temps les soirées de la ville a été depuis déserté par les artistes et le public : quelle n’est pas sa surprise quand elle découvre qu’il est aujourd’hui occupé par les seules, Zorra et Olga, deux créatures travesties avec qui elle partageait la scène autrefois. Terrées dans le noir, toutes deux craignent l’arrivée d’un instant à l’autre de la milice.

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Alternant chant, danse et jeu, cette création fraîchement achevée raconte des retrouvailles fortes en émotions entre des personnages hauts en couleur, aux caractères fort opposés : la craintive Olga, malchanceuse en amour et perdue dans l’alcool, au geste maladroit, toute de blanc vêtue sous sa perruque bleue, l’entreprenante Zorra, sensible et enflammée, à l’allure de pinup gracile et charmeuse, revêtant des atours d’un rouge flamboyant, et la vieille Georgie, femme forte au caractère bien trempé, au cheveu rare et au dos vouté, à la démarche volontaire et « droite » dans ses habits noirs.

Le public voyage de souvenirs tantôt joyeux d’un passé commun idéalisé, nostalgie d’une époque où chacun pouvait être soi-même, tantôt tristes d’un vécu personnel qui ne fut pas toujours à la hauteur des espérances de chacune, à la dure réalité d’un quotidien dictatorial difficile à accepter. Ce dernier par le truchement de la peur qu’il inspire tend à annihiler toute volonté de résistance, voire de rébellion, des individus face à la dictature, et pire encore, affaiblit subrepticement la moindre volition de liberté chez la personne elle-même, la soumettant à défaut d’une acceptation volontaire d’un régime totalitaire à son vouloir. Vont-elles résister face à l’arrivée de la milice ?

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Les personnages incarnés par Nicolas Pecullo, Martine Chenoz et Gianni Lentini sont portés avec conviction par les comédiens : leur présence sur scène est indéniable et leurs répliques fusent dans un aller-retour parfois digne d’un combat de boxe. Malgré un essoufflement dans le rythme en fin de spectacle, cette création est menée avec allégresse et vitalité par les artistes en scène. Saluons ici le beau travail, tant au niveau vocal que gestuel et corporel, des trois artistes qui ont créé ces personnages de cabaret grotesque (une des spécialités du lieu). Avec une mention spéciale pour le maquillage qui sied parfaitement à chaque caractère, maquillage signé Charlotte Chenoz.

Quelques tours de chant aux textes savoureux et drôles, également émouvants (mention spéciale pour la chanson de Georgie interprétée par Martine sur un texte de son cru) ponctuent les intermèdes parlés, où chacun se confie à tour de rôle (notons ici la belle incarnation d’Olga proposée par Nicolas ou encore les magnifiques et poignants monologues de Zorra et Georgie interprétés avec gravité). Les passages chorégraphiés sont également bien amenés et offrent des respirations bienvenues entre deux monologues (soulignons ici le très beau et délicat déhanché de Zorra, auquel Gianni offre son corps et ses traits).

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Côté scénographie, la sobriété est de mise pour mieux faire ressortir le jeu : un grand pan de mur blanc encadré par des spots rougeoyants éclaire du fond de scène les artistes lors des intermèdes dansés. Le décor, composé d’un fauteuil et un tourne-disque ancien côté jardin, d’une coiffeuse sur laquelle trône une tête servant à accueillir les perruques en son centre, et d’un piano côté cour, figure les différents espaces (scène et loge) d’un cabaret des années 30. Les changements de lumière alternant plein feu et rouge vif en passant par un bleu électrique, jouent sur le rapport passé/présent évoqué par les personnages et viennent renforcer l’atmosphère « cabaret » du spectacle présenté.

In fine, cette création nous interroge sur notre liberté menacée par les populismes et autres dictatures : d’actualité et d’inspiration brechtienne, elle nous questionne sur notre humanité, notre complexité, révélant notre être au-delà des apparences qu’il revêt. DVDM

Bon à savoir: une séance de rattrapage est prévue bientôt, nous vous en tiendrons informés!

Rmt News Int • 8 novembre 2018


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