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A la découverte des Beautés secrètes et rares de l’Enfer
Dans la jungle des livres, certains attirent le regard de par leur titre évocateur et leur couverture sublime. Tel est le cas de l’ouvrage édité par la BNF (Bibliothèque Nationale de France), « L’Enfer de la Bibliothèque, Éros au secret » co-écrit par Marie-Françoise Quignard et Raymond-Josué Seckel.
L’ouvrage explique par le menu la genèse de la mise au rebus des arts libertins : de la disparition de certaines œuvres à leur censure et réapparition au fil du temps…
De l’enfer religieux à l’enfer sans diable : une histoire rare de la littérature et des arts licencieux
Joliment relié, magnifiquement enrichi de gravures érotiques exceptionnelles et illustrations d’époque, estampes et lithographies en couleur ou en noir et blanc, photographies et croquis inédits, cet ouvrage se présente comme une anthologie des œuvres sulfureuses des XVI, XVII, XVIII, XIX, XX et XXI ème siècles écrites par les plus grandes figures de la littérature licencieuse. Décrivant les plaisirs interdits, ces œuvres « infernales » qualifiées de scandaleuses ont été longtemps censurées parce qu’elles étaient jugées contraires aux bonnes mœurs.
Maudites et condamnées par les tribunaux, elles ont été reléguées dans la section ‘Enfer’ de la bibliothèque royale au début du XIXème siècle, marquées sur la côte du seau d’Enfer et enfermées sous clés. Cette cotation était dictée par la morale puis fut abandonnée au cours du XX ème siècle avant d’être reprise par pragmatisme dans les années 80 pour simplifier la classification des œuvres à la BNF.
Ces livres étaient pourtant un objet de fierté pour leurs détenteurs et ornaient les bibliothèques de feu bien fournies des amateurs de littérature libertine. Ils attisaient la convoitise et titillaient la curiosité, distribués sous le manteau, en toute clandestinité, dans les boudoirs, les bordels, les prisons et même les couvents.
Côté littérature, outre la (re)découverte de Sade, Apollinaire, Louÿs, Bataille et Genet dont nous retrouvons des extraits de manuscrits qui semblent dialoguer les uns avec les autres, nous est offerte en partage la découverte d’œuvres d’anonymes à l’instar de « Thérèse philosophe » dont un fragment ouvre le recueil, voire encore de chansons et musiques grivoises méconnues.
Côté illustration, sont mises en avant les influences des mythologies grecques et romaines sur la représentation de l’Eros avec leur ribambelle de satyres et de dieux s’accouplant avec des nymphes et des déesses, dessinés dans des positions plus que suggestives sur des gravures, ô combien, magnifiques ! Des reproductions de tout un fond de livres érotiques illustrés et estampes rarissimes provenant des collections privées d’amateurs d’art japonais occupent également une place de choix dans l’ouvrage qui montre l’érotisme dans toute sa diversité (citons ici les photographies datant du début du XX ème siècle montrant deux femmes s’enlaçant).
Ce recueil nous invite à pousser les portes de l’Enfer, enfer hypnotique et fascinant ayant inspiré des générations d’artistes et d’auteurs, aujourd’hui réhabilité par ce beau-livre passionnant, fort bien documenté et savamment argumenté, dont nous vous conseillons la lecture. Diane Vandermolina
L’Enfer de la Bibliothèque, Éros au secret / Auteurs : Marie-Françoise Quignard et Raymond-Josué Seckel. 256 pages, 220 illustrations/21 x 26.5 cm, relié/Éditions de la BnF/39 euros
BON A SAVOIR SUR LA BNF
La BnF a pour mission de collecter, cataloguer, conserver, enrichir et communiquer le patrimoine documentaire national. La BnF assure l’accès du plus grand nombre aux collections sur place, également à distance. En complément de l’éventail impressionnant des œuvres littéraires en sa possession, la BNF possède un large fond d’archives sonores méconnues.