La Culture, partout, pour tous, pour faire de Marseille un phare culturel qui rayonne au-delà des frontières

Le défi culturel de Bruno Gilles

« La vie sans musique est tout simplement une erreur » écrivait Nietzche.  Nous pourrions étendre sa pensée à tous les arts et à la culture pour définir le fondement de la politique culturelle voulue par Bruno Gilles, prétendant à la Mairie de Marseille. Si « la culture est ce qui reste quand on a tout oublié », « elle est multiple », revêtant différentes formes, nous dit-il en préambule. Elle n’en reste pas moins populaire (c’est-à-dire qui appartient au peuple, ndlr) et nécessaire au vivre ensemble (créatrice de liens, ndlr) développe-t-il en substance.

Culture populaire et culture accessible à tous

En compagnie de Richard Martin, metteur en scène et comédien, fondateur et directeur du Théâtre Toursky, Eliane Zayan, ancienne élue déléguée au Cinéma et aux grands événements (2008-2014), créatrice du Festi’femmes qui fête cette année ses 25 ans d’existence, Marie Hélène Féraud, élue déléguée à l’Opéra-Odéon et à l’Art contemporain (2014-aujourd’hui) venue de la société civile et co-fondatrice en 2009 avec son époux d’un espace d’exposition situé à l’Estaque, et Robert Ciampi, Proviseur du Lycée La Fourragère – Nelson Mandela, ancien Principal de collège et Directeur d’école publique, auparavant professeur des écoles, Bruno Gilles, sénateur et ancien maire du 4/5 (en raison du non-cumul des mandats, il avait confié la mairie à Marine Posturino ndlr), candidat sans étiquette à la Mairie de Marseille, présentait le 28 février devant le théâtre Toursky les grandes lignes de son projet culturel pour Marseille : un projet réaliste où la culture serait au cœur de l’action politique.

D’emblée, Bruno Gilles annonce la couleur en invitant des personnalités du monde culturel aux trajectoires personnelles et professionnelles différentes, aux appartenances politiques diverses : la culture n’est pas le monopole d’un parti politique, elle est « ce qui relie les hommes et les femmes entre eux ».  Il s’est ainsi entouré d’experts du monde culturel marseillais avec qui il partage l’ambition de redonner à Marseille une vie culturelle offerte à tous en partage. Egrenant les trois axes forts de la politique culturelle qu’il mettra en place s’il est élu, il insiste sur le nécessaire « partage de la culture », pour faire de « Marseille une ville créative » en s’attelant « aux chantiers oubliés et abandonnés » par les précédentes mandatures, avec la « fraternité » pour socle d’une politique culturelle tournée vers tous. Pour cette raison, il a choisi un lieu hautement symbolique -la façade du Toursky où sont inscrits les mots de Léo Ferré, poète de la fraternité- pour présenter son point presse aux rares journalistes présents.

Culture et Fraternité

Richard Martin, pressenti comme futur adjoint à la culture en cas de victoire de Bruno Gilles explique avec fougue sa vision : pour que Marseille puisse « redevenir une ville fraternelle », il est important « d’ouvrir la culture à tous, qu’elle ne soit pas réservée à un petit nombre de privilégiés, en créant partout en ville », dans tous les quartiers -à l’instar du 2/3 où il rêve d’un quartier des poètes ndlr-, des « espaces de résistance culturelle » avec tous les saltimbanques marseillais. Par ailleurs, son premier engagement écrit sera de rencontrer et rassembler tous les acteurs culturels de la ville sans exception pour trouver des solutions ensemble. Soutenir les petits lieux de diffusion fait partie de ses priorités au même titre que consolider les lieux existants.

 « Il y a 1000 choses à faire pour rallumer tous les soleils, enchanter et fédérer les quartiers », citant la « Faite de la fraternité » qu’il a imaginé au Toursky et « l’Odyssée de la paix » à l’époque où en détournant un bateau de guerre, il rassemblait les artistes de la Méditerranée. « Je créerai une biennale autour des cultures de la Méditerranée » afin de renforcer le dialogue des cultures des deux rives développe-t-il entre autres propositions détaillées dans un document remis à la presse ce jour.  « Il faut unir les saltimbanques qui ont besoin d’outils pour créer », les artistes sont « les guerriers de la paix », « c’est avec eux qu’on peut changer l’état d’esprit de la ville », « lutter contre l’entre soi » et c’est « en soutenant leurs actions de création que cela peut être possible » déroule Richard Martin qui veut croire que la parole politique peut être respectée, car « si l’homme politique ne respecte pas sa parole, on n’a pas besoin d’aller voter. Soyons humains et fraternels. Arrêtons la politique comptable » : citant Maurice Schumann, qui disait avant de faire des choses, demandez-vous si cela en vaut le coût, il préfère dire « avant de faire des choses, demandez-vous si cela en vaut le coup ». 

 « Il faut être fier de notre culture populaire et la partager dans tous les quartiers» enchaine Eliane Zayan : cette dernière veut faire revenir le carnaval en centre-ville et le faire vivre dans tous les quartiers afin de lui redonner sa gloire d’antan. En effet, depuis qu’il a été déplacé à Borely – en raison des attentats de 2015 ndlr-, il a perdu de sa superbe et en termes de fréquentation, nous sommes loin des 8000 carnavaliers d’avant sa délocalisation. Elle souhaite également mettre en avant « la fête du vent » méconnue des marseillais et créer une « faite de la fraternité » dans tous les quartiers.

Les artistes, le maillon essentiel au développement de la politique culturelle

Regrettant la disparition de la mission cinéma qu’elle avait créée et la baisse du nombre de tournage dans la 2^ème ville de France, Eliane Zayan déplore le peu d’embauche de comédiens locaux alors qu’« on regorge de talents à Marseille » ainsi que la frileuse mise en avant de festivals de renommée internationale à l’image du FID. Nous pourrions rajouter ici l’absence d’écho dans la presse régionale du césar du meilleur court-métrage d’animation attribué à Gabriel Harel, un marseillais, pour « La nuit des sacs plastiques».

L’occasion pour Marie Hélène Féraud de préciser que « nous devons mettre les artistes au centre du projet culturel et les aider, les soutenir ». Précise, en connaisseuse du terrain, elle explique qu’il y a « beaucoup d’espaces vacants, notamment dans les écoles où les directeurs étaient logés, ces appartements sont vides et inutilisés, ils s’abîment et pourraient accueillir des artistes en résidence de création et des ateliers d’artistes. Marseille concentre le plus grand nombre d’artistes après Paris et il faut valoriser leur talent ».

L’idée de faire revivre les quartiers avec des street artistes est explicitée par Alain Parissi, le créateur du crapaud marseillais : ce dernier souhaite remettre de la couleur sur les façades de 16 immeubles, un immeuble par quartier, afin que chaque quartier devienne un espace à découvrir.  « C’est un moyen de mieux connaitre sa ville : il faut faire sortir les minots des quartiers et rien de tel que se perdre en ville pour mieux la connaitre » conclut l’artiste.

Des projets concrets et réalistes

Marie Hélène Féraud poursuit en annonçant la nécessité d’un plan Marshall des bibliothèques avec des horaires d’ouverture adaptés. Citant l’Opéra qui devait être rénové en 2013 (le Silo avait été créé pour accueillir les productions d’opéra pendant les travaux en 2013 ndlr), elle regrette que le grand théâtre n’ait eu droit « qu’à de la cosmétique de façade, il lui faut un lifting complet et s’attaquer à l’intérieur » en rénovant la fosse, le plateau, les loges qui sont en piteux état, voire créer « une salle de répétition ». « Mais ce n’était pas une priorité de la mairie » déplore celle qui désire que l’Orchestre Philharmonique de Marseille (qui a retrouvé de sa superbe sous la houlette de Maître Foster ndlr) devienne national et que l’Opéra soit mis en Etablissement public de coopération culturelle. Cette évolution de statut permettra d’avoir plus de souplesse dans sa gestion et nul n’est besoin de le nationaliser : « les opéras nationaux souffrent de contraintes accrues »  nous explique-t-elle quand nous la questionnons à ce propos.  « Il faut aussi plus ouvrir l’Opéra sur la ville, qu’il accueille des concerts de musique actuelle par exemple ».

Bien entendu tout n’a pas été dit, faute de temps, mais les axes ici dévoilés -qui permettraient à de nombreux artistes de pouvoir vivre dignement de leur métier sans avoir à recourir à des solutions alternatives pour « faire leurs cachets » dixit Richard Martin-  n’apparaissent pas si couteux. Quand nous l’interrogeons, Bruno Gilles explique qu’aujourd’hui, « nous ne pouvons plus faire de grands événements comme la Mars Céleste, trop couteuse, mais nous pouvons imaginer de belles fêtes populaires, pas trop couteuses ». Réaliste et conscient des difficultés économiques de Marseille avec notamment la question des couteux emprunts de la ville, le prétendant à la mairie ne souhaite pas développer des projets ‘pharaoniques’. Eliane Zayan, à ses côtés, précise à juste titre « nous n’avons pas besoin de construire de nouveaux lieux si nous fermons des théâtres ». Marie-Hélène Féraud, pragmatique, spécifie qu’il faut d’abord « conforter et s’appuyer sur ce qui existe déjà en donnant des perspectives aux petites structures, en les accompagnant dans leur développement, en les soutenant notamment à leur démarrage ».  

Culture et Education : l’un ne va pas sans l’autre !

« La politique culturelle, c’est d’abord la volonté d’un maire de mettre la culture au centre, d’en faire un vecteur fédérateur et non quelque chose en plus. Elle doit être une priorité au même titre que l’éducation et son apprentissage doit se faire dès le plus jeune âge ». «La culture doit être plus présente à l’école » continue Bruno Gilles avant de laisser la parole à Robert Ciampi, fin connaisseur du domaine éducatif.

« L’art et la culture reposent sur un principe : la diversité et permet l’ouverture à l’autre. Or l’école fait en sorte que l’enfant ne choisisse pas d’être artiste alors que tout enfant nait artiste. On lui apprend que ce n’est pas un métier. Pourtant c’est de la responsabilité de la société de faire des artistes et il faudrait que l’EAC (éducation artistique et culturelle ndlr) soit à 100% présente dans les écoles via des visites, des spectacles mais également des ateliers d’éveil, de création où les enfants participent. Il faut sortir de l’entre soi et permettre aux enfants de connaître leur ville, quand on sait que les élèves des quartiers nord n’ont jamais vu la mer. Pour cela, il faut instaurer un système de gratuité des transports pour faciliter l’accès à la ville à tous et l’accès à la culture pour tous : nous mettrons alors en place pour tous les élèves de CE2 la découverte gratuite d’un musée marseillais. Il faut ouvrir les Ecoles sur l’extérieur au lieu d’ériger des murs au nom de la sécurité des enfants, la paix passe par l’art et la culture » martèle celui qui croit que seuls l’art et la culture améliorent le vivre ensemble.

Bruno Gilles conclut en ajoutant qu’il augmenterait à 3% le budget culture de la ville afin de mettre en œuvre ces chantiers qui reposent sur une volonté de fédérer tous les acteurs culturels de Marseille, petits et grands. DVDM