L’épée de Damoclès plane sur l’avenir du DOCK DES SUDS et de la FIESTA DES SUDS
« Dans le contexte difficile de pandémie mondiale et d’une économie du spectacle vivant fragilisée par la crise COVID, LATINISSIMO souhaite alerter les pouvoirs publics face à de récentes décisions institutionnelles, inexpliquées, qui mettent l’association en grande difficulté. »
Ainsi débute le communiqué de presse envoyé par l’association organisatrice de la Fiesta des Suds, le rendez automnal qui devrait fêter ses 30 ans en octobre 2021, l’édition 2020 avait été annulée pour cause de seconde vague épidémique, ainsi que de BABEL MED MUSIC, un temps interrompu pour renaître sous l’appellation BABEL MUSIC XP dont la première édition devait se dérouler au printemps dernier, annulée pour cause de confinement. Pour rappel, LATINISSIMO est un opérateur culturel majeur marseillais également en charge depuis 22 ans de la gestion de la salle de spectacle du DOCK DES SUDS dans un quartier d’Arenc aujourd’hui en pleine mutation, ayant investi plus de 2 millions d’euro dans l’équipement de la salle. Or, la menace d’expulsion du lieu par Euroméditerranée et la baisse drastique de la subvention accordée par le Département 13 à la Fiesta, pourtant partenaire historique de la manifestation, viennent compromettre la survie de l’association ainsi que ses nombreuses activités.
Menace d’expulsion de Latinissimo du Dock des Suds
Dans ledit communiqué, nous apprenons qu’en mars 2016, « Euroméditerranée, envisageant dans le cadre de son projet d’urbanisme le déménagement du Dock des Suds, s’était formellement engagé à reloger l’association Latinissimo ». Or, « en dépit de l’engagement pris par Euroméditerranée, […] depuis mars 2020, la direction et le C.A. d’Euroméditerranée refusent tout échange avec Latinissimo malgré les demandes de rendez-vous maintes fois réitérées par l’association et les nombreux courriers officiels laissés lettres mortes. En juillet 2020, Euroméditerranée dénonçait le bail en cours et formulait à l’association une proposition sèche de Convention d’Occupation Précaire d’un local commercial d’une durée d’un an non-renouvelable à échéance de décembre 2021, transformant de manière unilatérale et sans concertation l’Autorisation d’Occupation Temporaire (AOT) des baux précédents », un ultimatum qui dans le contexte de crise sanitaire est « apparue inacceptable et incompatible » avec l’activité événementielle du Dock des Suds. « Face à cette proposition inadaptée, l’association a renouvelé ses demandes de rencontres auprès d’Euroméditerranée, sans davantage de réponse. Depuis janvier 2021, Euroméditerranée a dépêché à plusieurs reprises des huissiers et menace la structure d’expulsion en la déclarant occupant sans titre, tout en continuant de lui réclamer les loyers (d’avril à décembre 2020) alors même que l’État, propriétaire du bâtiment, lui interdit toute activité. Ce procédé unilatéral et autoritaire, mené sans aucune information préalable, contrevient à tous les engagements pris par Euroméditerranée (direction et Conseil d’Administration), auprès de l’association, conformément au relevé de décision de mars 2016 » précise Latinissimo qui aujourd’hui « exige d’être reçue et entendue par Euroméditerranée, comme acté conjointement, concernant l’avenir du lieu, les demandes de la structure sur la continuité d’activité et la prise en compte des investissements réalisés par Latinissimo sur le Dock des Suds depuis 22 ans ». Aux dernières nouvelles, l’expulsion pourrait avoir lieu dans les jours à venir, soit à la fin du mois de Mars 2021.
Avis de tempête sur la Fiesta des Suds
Depuis 1992, Latinissimo organise l’emblématique Fiesta des Suds, un festival qui « rassemble et ressemble à son territoire » et accueille chaque automne à Marseille des dizaines de milliers de spectateurs de toutes générations, origines et classes sociales confondues. « Au fil des décennies, ce temps fort culturel a d’ailleurs contribué à redessiner les contours d’Euroméditerranée, à requalifier l’espace portuaire au fil de son itinérance, des Docks de la Joliette au J4, de la Manufacture des Tabacs de la Belle de Mai jusqu’aux Docks des Suds à Arenc » stipule à juste titre le communiqué, ajoutant que « depuis 30 ans, indépendamment des colorations politiques qui se sont succédées à la tête de son exécutif, le Conseil Départemental des Bouches-du-Rhône a toujours été le partenaire historique et principal de ce festival à rayonnement national ». De même, les nouvelles et récentes orientations de la Fiesta des Suds, avec notamment l’investissement de la promenade du Mucem, ont été saluées par les tutelles, les médias, les artistes et le public. « Pourtant, en décembre 2020, la collectivité territoriale a signifié son désengagement auprès de Latinissimo, confirmé en janvier 2021 par une baisse radicale de 73% de son aide financière pour le festival. Notifiée 10 mois avant sa tenue, cette diminution signifiante ne peut que mettre en danger la tenue même de la prochaine Fiesta des Suds. Si le modèle économique de la Fiesta des Suds est sain avec un tiers de ressources propres, un tiers de partenariats privés et un tiers de financement public, la quasi-suppression de ce dernier laisse peu de recours à Latinissimo quant au maintien de la 30ème édition du festival. Cette situation envoie un triste signal au secteur du spectacle vivant à l’heure où celui-ci est durement impacté par la crise du coronavirus » conclue-t-il. L’association interpelle toutes les collectivités territoriales et l’État, ainsi que la Ville de Marseille dont l’ambition culturelle rejoint les valeurs immuables de la Fiesta des Suds car sans engagement concret et pérenne de toutes les tutelles, elle ne saurait proposer un événement digne de ses 30 ans. Une renégociation de la subvention avec le CD13 est actuellement en cours.
Rencontre avec Bernard Aubert
Nous avons interviewé Bernard Aubert, le fondateur de la Fiesta afin qu’il nous donne son sentiment sur cette inextricable situation qui met en danger l’avenir d’un opérateur culturel reconnu, également d’un festival à portée internationale drainant des milliers d’aficionados venant de France et de Navarre, voire d’ailleurs, et d’un lieu accessible et ouvert à toutes les musiques du monde et plus encore. Pour le moment aucune pétition n’a été mise en ligne, gageons que les aficionados du lieu et de la Fiesta s’y attèlent.
Diane Vandermolina
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