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The culture beyond borders

Occupations des lieux culturels : au-delà du symbole, une lutte commune  

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Depuis le début de l’occupation du théâtre de l’Odéon à Paris le 4 mars dernier pour « ré-ouvrir la culture », le phénomène prend chaque jour de plus en plus d’ampleur : au 18 mars, ce sont plus d’une soixantaine de théâtres (CDN, Scènes Nationales ou encore Opéras) qui sont occupés par des artistes et technicien.ne.s du spectacle en France (voir carte ci-dessous datée du 16 mars 21).

A Marseille, tout commence au Zef, scène nationale anciennement appelée le Merlan, où les artistes et technicien.ne.s ont symboliquement choisi la date du 12 mars, soir de remise des Césars, pour entamer leur « siège ». Ils ont imaginés leur propre cérémonie des Césars. Leur parodie toute en humour et revendication faisait écho aux propos de la Ministre de la Culture lors d’une intervention le 10 mars : Roselyne Bachelot -qui rappelons-le avait été accueillie avec espoir par les acteurs du monde culturel lors de sa nomination au poste de Ministre de la Culture- a qualifié ces occupations « pour réclamer la réouverture des lieux culturels » d’ « inutiles » et « dangereuses ». Son action au sein du Ministère jugée insuffisante et peu convaincante avait déjà entamé les espoirs des « cultureux ». Là, ses mots furent la goutte d’eau qui fit déborder le vase, sachant qu’en pleine crise sanitaire, économique et sociale, le gouvernement compte mettre en place la réforme de l’assurance chômage, déjà largement critiquée, au 1er juillet 21 et a fait voter en toute discrétion la loi scélérate sur la sécurité globale interdisant de filmer et photographier les forces de l’ordre en service et leur autorisant le port de leur arme en dehors des heures de service dans les EPR. De quoi en faire bondir plus d’un.

Inutiles et Dangereux ?

Que nous soyons pour ou contre le principe d’occupation des théâtres par les acteurs culturels, telle n’est pas la question car cela n’engage que notre vision parcellaire et morcelée, dictée par nos « a priori », de l’action. Aux yeux de certain.e.s, perplexes face à ce mouvement, il pouvait paraitre dérisoire que les théâtres soient occupés lorsqu’il n’y en avait que quelques-uns mais au vue de l’ampleur prise par le mouvement et du souhait d’élargissement des occupations à d’autres espaces, nous ne pouvons décemment qualifier d’inutile ce mouvement fédérateur à plus d’un titre : avec les gilets jaunes, les ouvriers (ou du moins ce qu’il en reste), le public, les associations de défense en tout genre et les politiques, les soutiens affluent de parts et d’autres en force si ce n’est encore en masse! Parce que les artistes et technicien.ne.s ne se battent ici pas uniquement pour leurs droits et le régime spécial de l’intermittence, souvent qualifié de privilège, mais pour les droits de chaque salarié.e., ce mouvement grandit de jour en jour. Alors, danger, il y a : celui d’être le point de départ d’une révolte plus générale de l’ensemble des français.e.s. Les étudiant.e.s – pas uniquement ceux des Ecoles de Théâtre ou des conservatoires – s’y mettent et probablement d’autres corps de métier dépassant le milieu de la culture vont prendre le train en marche. Là, oui, il y a bien danger pour le gouvernement.

Arrêtons d’opposer les uns et les autres

Diviser pour mieux régner; c’est ce à quoi doivent faire face les « occupant.e.s » des théâtres dans la mesure où leur occupation prend des formes différentes : certaines sont plus revendicatives que d’autres, plus artistiques, mais elles sont soumises à la même consigne sanitaire drastique d’un nombre réduit de dormeurs et dormeuses sur site et de présent.e.s en intérieur pour les AG ou agoras. L’objectif des occupant.e.s reste en filigrane le même : abroger la réforme de l’assurance chômage et demander à ce que le gouvernement soutienne réellement la culture ainsi que les artistes et technicien.ne.s du spectacle, notamment les jeunes, les primos accédant.e.s et toutes celles et ceux qui faute d’avoir effectué leurs heures se retrouvent au RSA ou à devoir radicalement changer de métier, voire au-delà. Sur ces points, nul ne doute que les revendications sont similaires, exprimées avec plus ou moins de force et de clarté, voire pour certaines avec maladresse.

La question d’une réouverture des théâtres secondaire

La réouverture des théâtres est une revendication importante certes, mais qui vient dans un second temps : empêcher la propagation de la covid nécessite des protocoles stricts et une réflexion claire sur les conditions d’ouverture. Les étudiants, les artistes et les technicien.ne.s la souhaitent rapide mais connaissent la complexité de sa mise en œuvre. La confusion dans la communication des revendications premières est alimentée par certaines directions de lieux occupés qui tentent de convaincre les occupant.e.s qu’une occupation artistique serait bien mieux perçue ou brandissent la peur de la covid et d’une fermeture de leur salle sur ordre du préfet en cas de débordement. Le message porté par les occupant.e.s se trouve également brouillé par une mise en avant de la réouverture de la Culture, entendons ici des lieux culturels, dans les médias. Que nenni ! La priorité est l’emploi, l’abrogation de la réforme de l’assurance chômage.

In fine : vers une convergence des luttes au-delà des différences

De nouveaux lieux, labellisés ou non, et des agences pôle-emploi sont occupés ; un appel à occupation des ministères du travail et de leurs locaux en régions a été formulé. Le mouvement grossit de jours en jours, d’heures en heures. Alors que le Premier Ministre doit s’exprimer sur un éventuel confinement partiel de certaines régions bien précises, la question des conditions de possibilité de la poursuite du mouvement d’occupation avec les allers et retours des occupant.e.s qui se relaient chaque jour se pose.

Un durcissement dans les déplacements de chacun.e risque d’attiser la révolte populaire en marche et drainer un plus large public dans le sillon des acteurs et actrices de la Culture.

Diane Vandermolina

Photo d’illustration © Claude Almodovar

Rmt News Int • 18 mars 2021


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