VUES SUR MER
EXPOSITION 13 SEPTEMBRE 2022 / 12 MARS 2023
MUSÉE REGARDS DE PROVENCE
En cette rentrée 2022 le Musée Regards de Provence présente l’exposition « Vues sur Mer », qui réunit 25 peintres, photographes, sculpteurs et vidéaste contemporains.
Ces plasticiens sont Alfons Alt, Astrid B, Zakary Beauvois, Jean-Pierre Blanche, Julien Boullay, Eric Bourret, Benjamin Chasselon, Marc Chostakoff, Mathis Clamens, Adrian Doura, Anke Doberauer, Josephine Valle Franceschi, Philippe Ivanez, Yann Letestu, Jacques Lucchesi, Olivier Monge, Patrick Moquet, Philippe Ordioni, Bernard Plossu, Wilbe, Marie-Laure Sasso-Ladouce, Christian Ramade, Nicolas Rubinstein, Jean-Jacques Surian, Jean-Benoît Zimmermann.
Parmi les œuvres présentées, évoquons ici LES BAIGNEURS, une composition de 3 mètres par 6,20 mètres réalisée par Anke Doberauer dans laquelle les pellets, les « pastilles » multicolores qui bordent, abordent ou voudraient déborder du tableau sont les envahissants débris de plastiques ramassés par l’artiste au bord de mer.
Subtile composition d’une décomposition, d’une dissémination sur la plage et sur l’eau : mais où vont-ils en diminuendo progressif du bord de l’eau aux bords de cette ellipse perlée qui structure l’espace ? Vers cette spirale invisible qui vrille à l’infini l’horizon chimérique d’un Embarquement pour Cythère à l’échelle de Disneyland ? Mais que regardent-ils, dos tournés, bras ballants, sauf, dans le panneau central, la fille et le nostalgique garçon qui, sans se regarder, semblent échanger un regard grave d’adieu ? Par rapport à la frontière de cet axe central qui le sépare en triptyque, si le tableau se pliait en dedans, les deux jeunes hommes noirs de droite feraient face à la blonde jeune fille de gauche en symétrie dissymétrie, contraste des genres, du nombre, des peaux et contrepoint des postures. Comme un désir, comme un rêve lointain d’un regard visant à l’autre rive et brisant un tabou ? Rêve d’autres rivages, d’autres visages, d’une autre vie mais dérives et naufrages figurés dans le jeu enfantin d’une mer où règnent des requins.
Disant le cercle et l’ellipse en abîme de la structure globale, globes, bouées d’une modernité de plastique inondant un tiers monde où dominent les peaux basanées. Leurre des riantes couleurs sans qu’affleure un sourire : bouées aux teintes de bonbon acidulé, gonflées d’un espoir au-delà de l’arc-en–ciel magique d’un monde meilleur de l’autre rive rêvée, de l’autre côté du miroir, du miroir aux alouettes des utopies des pays des merveilles. Les bouées, tels des SOS, se démultiplient en fragiles bulles de savon, bouées pour apprendre à nager, pour surnager en eau trouble, ou bouées de sauvetage de naufrages de balseros cubains et autres, ces migrants flottant sur leurs frêles esquifs sur le flot troublé des exils sous les fallacieux reflets d’un ciel absent. L’enfer sous le bleu paradis des amours enfantines ? Sous le soleil éclatant, l’envers ombreux des drames invisibles. Sous l’éclat des couleurs, le revers noir de la mélancolie. Sous la bouée, la boue. Sous la plage, les pavés de la dure réalité, sociale et raciale. Sur la mer, espoirs flottants, sous la mer, rêves naufragés, cauchemar de choses trop visibles qu’on voudrait ne plus voir. La mer et l’amour ont l’amer pour partage, on le sait et, désormais, la mort.
Plage donc de l’apparence, de la lumière, de l’enfance, de la jeunesse, de la santé, du jeu, où la belle forme des corps exclut l’informe, le difforme, la laid, le vieux, le malade, l’obscurité, la mort : notre monde.
Benito Pelegrín (écrit 28 mars 2013, MAC, lors de MP13)
Clins d’œil et références invisibles
L’embarquement pour Cythère (Watteau et Verlaine)
« Somewhere over the rainbow » (Magicien d’Oz)
L’autre côté du miroir d’Alice au Pays des merveilles
El Desdichado (1854) de Gérard de Nerval
Je suis le Ténébreux, – le Veuf, – l’Inconsolé,
Le Prince d’Aquitaine à la Tour abolie :
Ma seule Étoile est morte, – et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie
« Sous les pavés, la plage », slogan mural, Paris, 1968
L’enfer sous le bleu paradis des amours enfantines
« Le vert paradis des amours enfantines »…
Baudelaire
MOESTA ET ERRABUNDA
Dis-moi, ton cœur parfois s’envole-t-il, Agathe,
Loin du noir océan de l’immonde cité,
Vers un autre océan où la splendeur éclate,
Bleu, clair, profond, ainsi que la virginité?
Dis-moi, ton cœur parfois s’envole-t-il, Agathe?
[…]
La mer, la vaste mer, console nos labeurs!
Quel démon a doté la mer, rauque chanteuse
Qu’accompagne l’immense orgue des vents grondeurs,
De cette fonction sublime de berceuse?
La mer, la vaste mer, console nos labeurs!
Comme vous êtes loin, paradis parfumé,
Où sous un clair azur tout n’est qu’amour et joie,
Où tout ce que l’on aime est digne d’être aimé,
Où dans la volupté pure le cœur se noie!
Comme vous êtes loin, paradis parfumé!
Mais le vert paradis des amours enfantines,
Les courses, les chansons, les baisers, les bouquets,
Les violons vibrant derrière les collines,
Avec les brocs de vin, le soir, dans les bosquets,
– mais le vert paradis des amours enfantines,
L’innocent paradis, plein de plaisirs furtifs,
Est-il déjà plus loin que l’Inde et que la Chine?
Peut-on le rappeler avec des cris plaintifs,
Et l’animer encor d’une voix argentine,
L’innocent paradis plein de plaisirs furtifs?
« Goya, cauchemar plein de choses inconnues… »
Baudelaire
Informations pratiques et Visites :
Ouvert du mardi au dimanche, de 10h à 18h
Billet expositions temporaires : Plein Tarif : 7,50€. Tarifs réduits : 6,50€ – 5,70€ – 4,00 € -3,00€.
Visites commentées hors groupe : tarif d’entrée + 7€ /pers. (hors groupe), le mardi et samedi à 15h sur réservation. Visites commentées pour groupe : tarif d’entrée + 7€ /pers., tous les jours sur réservation.
Visite commentée gratuite hors groupe le 1er samedi du mois à 10h30, hors droit d’entrée sur réservation (6 à 25 personnes).
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