Le Festival des Arènes de Vérone fête son centenaire
Un siècle de passion lyrique et une édition anniversaire éblouissante
Dirigé par Paola Ciccolella, l’Institut Culturel Italien a été le théâtre de la présentation de la programmation ambitieuse et généreuse du Festival des Arènes de Vérone, portée par la Fondation des Arènes de Vérone, en présence des co-directeurs artistiques du festival, Stefano Trespidi et Cecilia Gasdia, également Surintendante, le 9 mai dernier.
Cette édition anniversaire est spéciale à bien des égards : non seulement le festival s’étend sur 2 mois et demi, du 16 juin au 9 septembre, mais il célèbre également son 100e anniversaire avec une nouveauté étonnante. Chaque saison, une nouvelle production est proposée, et cette année, ce seront deux créations exceptionnelles qui illumineront les Arènes : « Rigoletto » et « Aïda » de Verdi! De plus, nous aurons le plaisir de retrouver Kaufmann et Alagna, qui ont fait leurs débuts de carrière ici-même.
Un programme ambitieux et généreux
Cette édition propose une multitude d’opéras mondialement connus, tels que ceux de Verdi, Puccini, Rossini, et Bizet, présentés dans les mises en scène des plus grands metteurs en scène, à l’instar de Franco Zeffirelli, qui nous a malheureusement quittés quelques jours avant la première de sa dernière « Aïda » en 2019.
Au total, huit opéras et cinq événements spéciaux seront présentés, mettant en vedette des artistes de renom, afin d’offrir un programme riche et intense en découvertes avec des représentations plus espacées dans le temps et des opéras en plus grande alternance par rapport aux années précédentes.
Au menu, nous retrouverons « Aïda » et « Rigoletto » dans de nouvelles mises en scène et « Carmen » (Bizet), « Le Barbier de Séville » (Rossini), « La Traviata » (Verdi), « Nabucco » (Verdi), « Tosca » (Puccini) et « Madame Butterfly » (Puccini) dans les mises en scène historiques qui ont fait le succès des Arènes dont trois sont signées Franco Zeffirelli (« Carmen », « La Traviata » et « Madame Butterfly »).
Juan Diego Flórez, Piotr Beczala, Asmik Grigorian, Elena Stikhina, Christian Van Horn ou encore Riccardo Chailly feront leurs premiers pas dans les Arènes de Vérone, tout comme la soprano Nadine Sierra et la mezzo-soprano Marina Viotti qui participeront pour la première fois à une production scénique du Festival. Les cinq soirées de gala célébreront Jonas Kaufmann (20 août), Plácido Domingo (6 août), Juan Diego Flórez (23 juillet), la danse avec une soirée “Roberto Bolle and friends” (19 juillet) ainsi qu’un grand concert de l’Orchestre de la Scala de Milan dirigé par Riccardo Chailly (31 août).
Deux créations nouvelles pour illuminer les Arènes
La nouvelle production d’ « Aïda », mise en scène de Stéfano Poda, est présentée en ouverture du festival le 16 juin à l’occasion du grand week-end d’ouverture festif qui mettra toute la ville en fête. Diffusée en direct de par le monde, elle offrira à voir, selon Stefano Trespidi, un spectacle à couper le souffle. Il promet « une esthétique moderne, des effets visuels époustouflants et une modernité jamais vue auparavant dans les Arènes ».
Quant à « Rigoletto » dans une mise en scène signée Antonio Albanese, il rendra « hommage à l’âge d’or du cinéma néoréaliste italien des années 50 et 60. » A découvrir à partir du 1er juillet.
Des artistes de renom et de jeunes talents à l’honneur
Les plus grandes voix internationales seront présentes, à l’image de Roberto Alagna, Plácido Domingo, Yusif Eyvazov, Vittorio Grigolo, Jonas Kaufmann, Aleksandra Kurzak, Clémentine Margaine, Anna Netrebko, Lisette Oropesa, Anna Pirozzi, Anita Rachvelishvili, Luca Salsi, Erwin Schrott, Ekaterina Semenchuk, Ludovic Tézier, Sonya Yoncheva, perpétuant la tradition de ce lieu qui a vu passer des artistes tels que Callas au début de sa carrière européenne.
De plus, de nombreux jeunes artistes émergents auront également l’occasion de briller. En effet, l’une des particularités de ce festival est d’intégrer les talents prometteurs de la scène lyrique à l’instar de Sofia Koberidze, jeune mezzo-soprano géorgienne ou encore le ténor italien, Matteo Mezzaro, dans les productions proposées, conformément à la vision de Cecilia. Originaire de Vérone, Cecilia, également pianiste, a commencé comme figurante, puis a rejoint le chœur avant de devenir soliste du festival des Arènes de Vérone. Il y a 25 ans, elle a également chanté à l’Opéra de Marseille. Cette ville et cet opéra lui tiennent particulièrement à cœur, car sa fille, Alexandra Bartoli, a fait ses débuts cette année dans « Macbeth ».
En tant que directrice depuis 5 ans, Cecilia souhaite faire découvrir les nouvelles générations d’artistes au public et leur offrir la possibilité de chanter aux côtés des plus grands chanteurs. « Chanter dans les Arènes ne requiert pas une voix puissante, mais surtout une technique vocale et une projection de qualité » détaille-t-elle.
Un festival grand public sans compromis sur la qualité artistique
La transmission et l’éducation musicale occupent une place centrale dans son travail. Il n’est pas nécessaire d’être un expert en opéra pour apprécier ces œuvres lyriques, comme en témoigne la diversité du public qui assiste au festival, nous explique la co-directrice. Seuls 10 % des spectateurs sont de fins connaisseurs de ces œuvres.
« C’est un événement grand public et populaire qui ne fait aucun compromis sur la qualité artistique », précise la co-directrice, citant Ricardo Mutti sur la question de l’exigence musicale. « En 1980, Mutti a dirigé son premier « Requiem de Verdi » dans les Arènes, et en 2021, il est revenu pour les 150 ans d’ « Aïda ». Les Arènes ont également accueilli des mises en scène historiques, notamment celle de « Carmen » par Zeffirelli il y a 20 ans ou encore « la Traviata » » ajoute-t-elle. Il est primordial de maintenir la qualité et la grandiosité du festival.
Une scène immense pour des décors grandioses
Les Arènes, propriété de la ville depuis le 16ème siècle, constituent un patrimoine précieux à préserver et à restaurer. Transformé en plus grand théâtre du monde, l’amphithéâtre accueille chaque soir 13 000 spectateurs. Comme le souligne le co-directeur, « avec ses 44 mètres de longueur, la scène des Arènes est trois fois plus grande que celle de la Scala de Milan ». Autant dire que cette immense scène se prête merveilleusement bien aux décors imposants des opéras. « Depuis 1913, ce festival est le plus ancien et le plus grand théâtre en plein air au monde, et ce lieu offre un spectacle unique même s’il a été interrompu par les deux guerres mondiales et le covid».
Une vision pour le futur : intégrer les nouvelles technologies
Cecilia veille à conserver les traditions tout en insufflant une vision tournée vers l’avenir. « Des adaptations aux nouvelles technologies sont prévues, notamment l’expérimentation d’un écran vidéo de 400 mètres carrés avec des LED et la création d’un pont mobile pour les changements de décors, afin de les rendre plus rapides et d’éviter de longs entractes » développe Stefano.
Les coulisses du festival : un véritable village animé
Au quotidien, ce sont 1400 personnes, principalement des habitants de Vérone, qui travaillent pour le festival. Le co-directeur précise que « chaque soirée propose une production différente, et c’est un travail H24. Le spectacle se termine à 1 heure du matin, puis le démontage a lieu jusqu’à 6 heures, et à 7 heures, la scénographie est mise en place pour la soirée ».
Dans la même journée, ils travaillent « sur trois ou quatre œuvres différentes simultanément, sur plusieurs sites, ce qui est unique au monde. Aucun autre théâtre ne peut en faire autant. Tous les travailleurs de Vérone sont fiers de cet héritage culturel, et les coulisses sont comme un village, avec ses histoires d’amour qui naissent et se brisent. C’est un mélange de la beauté du lieu, de la musique, de la scénographie et des centaines de personnes qui se rencontrent dans cette ruche ».
Ce festival est l’occasion de venir à Vérone pour y découvrir l’art lyrique, un art bien vivant, et vibrer au rythme du bel canto ! A vos carnets.
Diane Vandermolina
Le programme complet :
Aïda (Verdi), nouvelle production de Stefano Poda à partir du 16/06
Carmen (Bizet), mise en scène de Franco Zeffirelli à partir du 23/06
Le Barbier de Séville (Rossini) d’après Hugo de Ana à partir du 24/06
Rigoletto (Verdi), nouvelle production d’Antonio Albanese à partir du 01/07
La Traviata (Verdi), mise en scène de Franco Zeffirelli à partir du 08/07
Nabucco (Verdi) d’après Gianfranco de Bosio à partir du 15/07
Tosca (Puccini), mise en scène de Hugo de Ana à partir du 29/07
Madame Butterfly (Puccini) d’après Franco Zeffirelli à partir du 12/08
Plus d’infos : tarifs de 22 € à 330€ / infos sur : www.arenadiverona.it
Bon à savoir :
Plus de 500 artistes participent chaque soir aux représentations dans ces immenses arènes qui peuvent contenir plus de 13.000 places et qui accueilleront 630.000 spectateurs sur la durée totale du festival. 49 représentations sont données en un peu moins de trois mois.
Encadré :
En amuse-bouche : Une soirée lyrique enchantée avec de jeunes talents prometteurs
La présentation était suivie d’un récital lyrique avec 3 jeunes chanteurs, la soprano suisse Daria Rybak, la mezzo Sofia Koberodze et le ténor Matteo Mezzaro, accompagnés au piano par la directrice elle-même ! Et quel programme, quelle soirée ! Quelle mezzo ! Sofia, amoureuse de l’Opéra Français, rêve de chanter dans Werther ou encore Manon de Massenet et elle nous a enchantés avec son interprétation magnifique de « L’amour est un oiseau rebelle » de Carmen – sa diction française est remarquable, à la hauteur de nos compatriotes.
Elle nous a également régalés avec sa performance légère et pétillante d’ « Una voce poco fa » du Barbier de Séville – on l’imaginerait très bien dans le rôle de Musette dans La Bohème. Sans oublier sa superbe interprétation de « Oh, dischiuso è il firmamento » dans Nabucco, ainsi que son duo très réussi avec Daria Rybak dans « Scuoti quella fronda di ciliegio » de Madame Butterfly, où elles ont toutes les deux fait preuve d’une belle harmonie et écoute, avec Daria Rybak offrant une voix idéale pour incarner Cio Cio San. Daria a particulièrement séduit le public avec son duo avec le ténor sur « Parigi, o cara », aria de La Traviata.
En ce qui concerne le ténor, Matteo n’est pas en reste et a fait preuve d’une présence scénique remarquable, sa voix chaude aux aigus rayonnants et ensoleillés a enchanté le public tant dans ses duos que dans ses solos verdiens, notamment « De’ miei bollenti spiriti » de La Traviata et « La donna è mobile » de Rigoletto. Des jeunes talents à suivre ! DVDM
En une, Festival d’opéra des arènes de Vérone © Foto Ennevi
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