Paul Amas, l’humanité en bandoulière
« Rêver en grand et suivre son cœur »
Avec un container transformé en unité médicale mobile, Paul Amas sera devant l’Assemblée Nationale à Paris le 25 septembre 2023. Le départ pour l’Arménie se fera devant l’église arménienne du Prado à Marseille le 29 septembre 2023.
« On ne se comprend pas, on ne parle pas la même langue et pourtant le cœur bat… »
Il n’existe pas deux façons d’agir avec humanité. L’actualité, éprouvante, terrible, en apporte la preuve chaque jour. Partout dans le monde, des femmes, des hommes, se lèvent pour aider, réconforter, apporter la chaleur d’une fraternité qui se moque des frontières, de la politique et des états d’âme. Nous avons rencontré quelqu’un que la vie met sur le chemin de ceux qui en ont besoin, Paul Amas. Le jour suivant le terrifiant tremblement de terre au Maroc, toute une armada était déjà sur pied, matériel sanitaire, chirurgical etc. Cet homme soulève des montagnes par la seule force de sa volonté, de son courage et de son amour des autres. Pour ce faire, tout simplement, il agit.
Sur facebook, Paul Amas a publié ce message suivi d’un dessin. Aucun mot ne peut décrire plus justement l’homme et son action que les mots et le visuel de son frère, Michel Amas.
« Moi je connais un petit quelqu’un qui manie la plume comme il manie le pinceau. C’est un magicien des mots et un orfèvre du cœur.
Il brandit son épée de justesse et non pas de justice. Ci qui est magique en lui c’est que de quelques mots, ou en quelques coups pinceau il
Sais créer l’émission. Je lui ai demandé « fais-moi une affiche pour notre mission en Arménie, je veux simplement de l’humain » Et il m’a offert ça. « Michel Amas, tu es un couteau suisse à toi tout seul, dans tous les éléments de ta vie. »
Paul Amas, fils de…
« La vie est une arène. Avec mon frère on va la transformer en cirque. »
Paul Amas n’est pas seulement un président d’association, un chirurgien-dentiste doublé d’un écrivain fortement impliqué dans l’humanitaire, il est fils de la transmission, fils de l’humanisme, fils de Joseph et de Raymonde. Le premier a débarqué, pendant la guerre, sur une péniche pour « que je n’aie pas à parler allemand ». La seconde, Raymonde, est allée par trois fois à la gare Saint-Charles pendant la guerre avec une petite valise en carton que Paul conserve toujours, et a ainsi récupéré des bébés juifs qu’elle a menés à l’Orphelinat de Marseille. La perte, très tôt de son père a donné l’impression à Paul Amas, pendant de longues années, qu’il lui avait volé son enfance mais il dit lui-même d’une manière poétique : « Il ne m’a pas volé mon enfance, il a créé un Peter Pan. » Paul Amas a gardé ses rêves d’enfant. Tout, alors, devient réalisable puisque cela existe dans ses rêves, et il se donne les possibilités de le faire. S’il est le fils de Joseph et Raymonde, il est aussi Le Frère, celui de Michel. Un frère qu’il associe dans ses mots, dans son cœur et sa tête. Chez Paul Amas, c’est le ‘Nous’ qui existe, pas le ‘Je’. Son attachement à la famille fait la fierté de cet homme, et détermine, sans-doute aucun, son altruisme et son histoire.
Un homme de défi, un homme d’action
Paul Amas est un homme cultivé, entreprenant, attentionné, bienveillant, sincère. Il est le fondateur et le fer de lance de la magnifique association « Les sourires de Garibaldi ». C’est aussi, bien sûr, un homme d’action. Celles qu’il entreprend au nom de l’association sont intelligentes, menées de main de maître. Tous ceux qui, peu ou prou, de quelque manière que ce soit, s’impliquent dans ces actions, ont à cœur l’Humanité tout entière.
« Les Sourires de Garibaldi »
« Dans nos vies aliénées à tant de choses, on passe peut-être à côté de l’essentiel « l’Humain ». Avec nos « sourires de Garibaldi » nous essayons de fédérer autour de projets divers, malheureusement souvent guidés pas l’actualité. Un maximum de bonne volonté peut déplacer des montagnes ou apporter une goutte d’eau. Mais ces gouttes d’eau sont les nôtres. En l’espace de trois années, nous avons été à l’origine d’un don de plus de quarante mille masques Décathlon pour les soignants de première ligne lors de la crise sanitaire de la Covid. Nous avons fait entrer en France plus d’un million de masques chirurgicaux. Nous avons rénové un orphelinat en Afrique, créé la première salle de sport dans un hôpital pour enfants, rénové la totalité de 14 ème étage de l’hôpital d’enfants de la Timone dans le service du professeur Chabrol. Plus de 150 bénévoles, autant de donateurs, une vingtaine d’entreprises nous ont porté main forte. Lors de la crise en Ukraine nous avons été les premiers à apporter du matériel médical, de l’argent, mais surtout nous avons été les premiers à ramener plus de 250 femmes et enfants dans notre cité phocéenne, bâtissant un partenariat solide avec la mairie de Marseille. Nous avons modifié un conteneur en unité de soins multifonction avec échographie cardiaque, échographie obstétrique, angiographie, dialyseur…, unité montée sur essieux faisant de cet outil médical un atout important sur zone de guerre. Voilà en quelques mots qui nous sommes. Une seule règle, rêver en XXL et laisser faire la magie de l’Humain, car l’Humain c’est bien plus contagieux que la Covid. Alors il est sûr que ce ne sont que quelques gouttes d’eau face aux besoins, mais se sont nos gouttes d’eau. Au soir de ma vie je fermerai les yeux en me disant que j’ai su transmettre à mes enfants des valeurs, se tourner vers l’autre sans rien attendre, faire du bien et partir sur la pointe des pieds tel est notre credo. » Paul AMAS président de l’association
Interview
Danielle Dufour-Verna -Paul Amas, qui êtes-vous ?
Paul Amas -D’habitude quand on me demande qui je suis, on me demande ce que je fais. Il faut savoir qui j’ai eu comme parents. Je dis je suis Paul, fils de Joseph et de Raymonde et cela définit les engagements que je prends. On m’a transmis des valeurs et je veux faire la même chose. Dans notre univers on est habitué à bien d’autres choses qu’à des valeurs humaines, on essaie de repositionner tout cela dans l’humain.
DDV -Vous pensez être marginal ?
Marginal, oui ! On a oublié l’essentiel ! Avant, on ne pleurait pas quand on faisait une bonne action, maintenant oui parce qu’elle vient là comme une cerise sur un gâteau. On n’a plus l’habitude alors on crée une émotion qui n’existe plus.
DDV -Comment avez-vous commencé ?
Paul Amas -On a commencé simplement. Quand j’ai créé cette association, « Les sourires de Garibaldi », j’ai acheté des costumes de super-héros pour donner de la lumière aux enfants hospitalisés. « Les nez rouges » dont je faisais partie auparavant, ne font plus vraiment rêver les enfants. Avec les costumes de Batman, Superman, tous les amis avec lesquels je partais portaient un masque pour cacher nos larmes. Il ne faut pas laisser voir son émotion quand on est devant des enfants malades dans, souvent, des conditions dramatiques. Je dis souvent, la vie est une arène. Avec mon frère on va la transformer en cirque.
« …Je vais faire ce que je sais faire de mieux, je ne remercierai personne parce que je ne vais pas vous remercier d’avoir aidé des humains. J’ai embrassé les gens autour de moi et je suis parti. Quand on fait du bien, on part sur la pointe des pieds.»
« Quand nous sommes allés chercher les gens en Ukraine, ils attendaient, dès 5 heures du matin, dans le froid glacial. Dans leurs yeux, on pouvait lire l’incrédulité : « Ils sont vraiment venus nous chercher ! ». Une vieille femme s’approche de moi, met sa main sur mon visage et moi je pleure comme un bourricot. On ne parle pas la même langue, mais c’est le cœur qui parle, et on se comprend. La Mairie de Marseille a été fantastique. Il y avait la Préfecture, la police devant le bus, climatisation de gymnase. Nous sommes arrivés en pleine nuit, on avait à manger, des médecins. La mairie de Marseille a mis des logements à la disposition des sinistrés. A ce moment-là, cette histoire nous dépasse. On n’a pas le temps de se dire au-revoir correctement. Après je dis ce que je dis tout le temps et ça me fait du bien « C’est le moment où, normalement, je dois remercier tous les gens qui m’ont aidé alors je vais faire ce que je sais faire de mieux, je ne remercierai personne parce que je ne vais pas vous remercier d’avoir aidé des humains. » J’ai embrassé les gens autour de moi et je suis parti. Quand on fait du bien, on part sur la pointe des pieds.
DDV -Comment réussissez-vous à fédérer ?
Paul Amas -Tout se passe sur internet, facebook. J’ai besoin de cela, j’ai besoin d’un échographe. J’en ai trois, quatre… Quand on a dit « on va refaire le 14e étage de l’hôpital de la Timone », on s’est retrouvé 186 participants bénévoles, 140 entreprises, 140 donateurs pour un peu plus de 850 000 euros de travaux. C’était dans un état lamentable, nous avons tout rénové jusqu’aux douches à l’italienne, etc.
« Quand on fait de belles choses il y a toujours des cons pour vous dire des choses merveilleuses parce que les cons, c’est comme le COVID, ça se multiplie. »
Certains me demandaient pourquoi cet étage-là ? Parce que vous n’avez pas d’enfant malade, parce que vous ne savez pas ce que c’est d’attendre dans des couloirs décrépis. La première idée était de rendre l’hôpital agréable. Tout ce qu’on a fait était tout simplement magique.
Un container pour l’Arménie
« En voyant faire les enfants j’ai eu une émotion énorme parce que j’ai pensé qu’il étaient mieux que moi. »
DDV –Vous me parlez de votre formidable action pour l’Arménie ?
« Moi arménien, je vais jouer ce soir pour les enfants victimes du tremblement de terre en Turquie » (Levon Minassian)
Paul Amas – Nous avons d’abord fait un concert solidaire avec conférence par un historien, et Lévon Minassian, emblématique doudoukiste international et Roselyne Minassian, artiste lyrique. J’ai connu cet immense artiste, Lévon Minassian, alors qu’il se produisait sur scène avec Chico qui est un grand ami. Lévon Minassian s’est avancé et a dit « Moi, arménien, je vais jouer ce soir pour les enfants victimes du tremblement de terre en Turquie. » Quand je vois cet homme et que je le connais, je suis assis par son humanité. Pendant le concert une artiste, Luiza Gragati, a peint un tableau en direct et ce tableau a été mis aux enchères à la fin du concert. Ce qui me plait c’est apporter les choses concrètement. Avec cet argent, nous allons aider le système de soins arménien. On a transformé en quinze jours un container en unité médicale mobile. Une fresque est dessinée sur le container et ce sont les couleurs de la France et de l’Arménie qui s’affichent à l’aide des mains peintes des enfants qui l’ont décoré. Tout ce qu’on a fait est moins important que cette image-là. C’est un legs humain. On transmet quelque chose. En les voyant faire j’ai eu une émotion énorme parce que j’ai pensé qu’ils étaient mieux que moi.
Le 25 septembre devant l’Assemblée Nationale
Le 25 septembre 2023, à Paris, le container sera positionné devant l’Assemblée Nationale où j’interviendrai dans un discours pour l’Arménie. Nous partirons de Marseille le 29 septembre 2023, devant l’église arménienne du Prado, avec toute une cérémonie qui accompagnera ce départ. Je ne suis pas arménien, mais tout doit être fait dans le respect total de leurs façons d’être. Je veux qu’on sache que tout ce qu’on nous a donné n’a pas été détourné. On l’a amené à bon port. Puis on fera ce qu’on fait chaque fois, on va partir sur la pointe des pieds en ayant vécu une aventure humaine plus grande que nous.
Danielle Dufour-Verna
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