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HOMMAGE A VASARI à l’Alacazar les 12 et 13 septembre

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LES VIES des plus excellents architectes, peintres et sculpteurs marseillais de Pierre Puget à  Charles Camoin

Ce titre que Jean-Noël Bret, membre de l’Académie des Sciences, Lettres et Arts de Marseille, dont il a été Président, donne au colloque qu’il dirige, est un clin d’œil admiratif, et hommage que je partage hautement, à Giorgio Vasari. C’est une traduction de celui de son fameux ouvrage Le Vite dei piu eccellenti Architetti, Pittori de Scultori italiani da Cimabue, insino a’tempi nostri, paru à Florence en 1550 et augmenté largement en 1568. On note que Vasari prétend parler des artistes « italiens », mais, en fait, c’est surtout de ses compatriotes toscans qu’il parle, et, Jean-Noël Bret, des Marseillais, du XVIIe au XXe siècle.

C’est vrai que la Toscane est un miracle artistique et intellectuel en son temps et, Marseille, certes bien loin de rivaliser avec elle, même modeste en comparaison, a tout de même un patrimoine artistique peu connu, méconnu ou inconnu, qu’il y a justice à rappeler aux Marseillais, souvent négligents ou ignorants du leur.

Sous les auspices de Vasari, ce colloque dont il n’est pas l’objet mais le prétexte n’en parle pas, hors l’introduction de Jean-Noël Bret, qui a aussi le mérite de rappeler les dettes que nous avons de ce mal aimé, comme artiste, de la critique, injuste à son égard. J’en saisis le prétexte pour en dire quelques mots.

 

Giorgio Vasari 

Né en 1511 dans la République de Florence, il meurt en 1574 dans ce qui était devenu le Grand-Duché de Toscane par la grâce de Charles Quint. Il est d’une famille modeste de marchands. Par chance, peut-être parce que les Médicis, à l’origine exploitants agricoles, puis négociants en laines et puissants banquiers rayonnant dans toute l’Europe avant de devenir famille patricienne puis princière, n’ont pas perdu le sentiment de leur roture originelle, leur cour à Florence est accueillante aux artistes et même aux jeunes talents : Laurent de Médicis y a installé en fils Michel-Ange. Vasari entre dans l’atelier de Michel-Ange puis à la cour. Du même âge que les jeunes ducs Alexandre et Hippolyte, il est traité en ami, et reçoit presque les mêmes leçons.

Il sera, dessinateur, peintre, architecte urbaniste, et le premier historien d’art avec ses Vite…En 1554, à la demande de Cosme de Médicis, Vasari rénove l’ancien Palais de la Seigneurie, le Palazzo Vecchio. Cosme lui confie en 1560 la construction d’un ensemble immobilier destiné à grouper les bureaux administratifs et judiciaires de Florence, le complexe des Offices : c’est la célèbre Galerie des Offices, partant du Palazzo Vecchio et débouchant, au bout de sa longue cour étroite, sur l’Arno, superbe exemple d’urbanisme, unique rue de la Renaissance d’un seul traitement architectural, avec fonction de piazzale, de vivante place publique. Vasari y travaillera jusqu’à sa mort en 1574.

 

Héritage de Vasari

Ses Vite…, ses quelque cent-cinquante Vies…d’artistes du XIVe au XVIe siècle, sont un inestimable apport à l’histoire de l’art qu’il inaugure et resteront un modèle pendant très longtemps. Mais ce ne sont pas de simples biographies. Vasari, dans une approche critique toute moderne, tente de cerner le style particulier d’un peintre, sa « patte », sa « main, » bref sa « manière ». Au risque de sa reproductibilité académique.

La Belle manière et maniérisme

Pour définir la Belle manière en peinture, geste révolutionnaire, en son époque néoplatonicienne, il récuse le credo humaniste platonicien de la mimesis, de l’imitation de la nature, car elle n’est pas toujours belle. Donc, c’est la Belle Nature, nature corrigée qu’il faut représenter, une beauté obtenue par l’assemblage de morceaux choisis de beauté, visage, membres copiés chez d’autres peintres : en somme, une beauté de synthèse ce que faisaient déjà les Grecs et, aujourd’hui, les pubs, sans compter tous les moyens modernes de corriger —ou falsifier— l’image avec la photo shop entre autres procédés.

Vasari, aujourd’hui classé comme peintre maniériste, est donc l’un des premiers formulateurs, en tous les cas penseur du maniérisme (seul art contemporain de son appellation), prônant un art émancipé de l’imitation, de la mimesis, au profit de l’invention, la phantasia. La mort de Raphaël,1520, et l’une de ses dernières œuvres, la Chambre d’Héliodore du Vatican, marquaient la fin de la recherche d’harmonie d’une époque. Le sac de Rome en 1527 par les armées de Charles Quint avait causé la fuite et la dispersion des artistes, forcés à un travail en commun moins grandiose, plus personnel, singulier : un abandon des sereines lois de l’équilibre et de la perspective harmonieuse au profit de la grazia, et de l’allongement des formes.

Renaissance et gothique

C’est de Vasari que semble venir le terme « gothique » en mauvaise part, comparant avec la nouvelle architecture classique imitée de l’Antiquité, celle étrange du Moyen-Âge, produit du peuple barbare des Goths, parmi lesquels les Italiens rangeaient les Français qui n’avaient pas donné une belle image d’eux durant les incessantes et désastreuses guerres d’Italie.

Mais, à coup sûr, à travers Jules Michelet dans son Histoire de France (1835) qui l’adapte et adopte, nous lui devons la notion et le terme de Renaissance, paru sous la plume de Vasari pour qualifier déjà la nouvelle manière de peindre de Giotto de rinascita et saluant son époque de rinascimento de la bella maniera (renaissance).

Nous le saluons trop brièvement ici à l’occasion de ce colloque marseillais sous son égide.

Benito Pelegrín

Bibliothèque de Marseille, l’Alcazar, jeudi 12 et vendredi 13 septembre 2024, de 9h30-à 18 heures. Entrée libre

En une, portrait de GIorgio Vasari ©DR

Rmt News Int • 8 septembre 2024


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