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Venu de Lettonie, avec une co-production franco-belge, un merveilleux film d’animation en 3D (l’animation, en 3D, pas la projection).
Une Εuvre virtuose audacieuse, sans parole.
Un chat par nature individualiste et divers animaux rΓ©sistent, dans un paysage tropical, Γ une brutale et colossale montΓ©e des eaux, sur une planΓ¨te dont l’humanitΓ© semble avoir disparu, n’ayant laissΓ© que ruines derriΓ¨re elle. Β« Semble Β», car on ne sait pas vraiment. C’est lΓ prΓ©cisΓ©ment toute la puissance narrative du film : nous laisser baigner dans cette incertitude fictive et temporelle, en injectant de l’humanitΓ© par Β« projection Β» de nos regards, sans facilitΓ© ou presque.
Nos hΓ©ros animaux doivent surmonter leurs dΓ©fiances, puis leur mΓ©fiances, pour embarquer et survivre ensemble Γ bord d’un bateau Γ voile de fortune. Hors ce bateau, une vΓ©gΓ©tation luxuriante mais ballotΓ©e, des troupeaux divers, et une baleine Β«embarquΓ©eΒ» elle aussi malgrΓ© elle par les flots dΓ©bordants. Pour ne pas spolier je n’en dirai pas plus mais le film Γ ce sujet n’est pas dans un manichΓ©isme mort / vie, pas moralisateur. Il admet la complexitΓ© de la nature, y compris dans ses « catastrophesΒ Β» et leurs consΓ©quences. La nature n’a pas d'Β Β»intentionΒ Β», l’eau, entre autres, y est danger et ressource.
L’Γ©trange miracle du film est qu’il se maintient constamment entre deux eaux : celles de anthropomorphisme et du rΓ©alisme. Selon certaines critiques, ceci est source d’incohΓ©rence. J’y vois plutΓ΄t une ambiguΓ―tΓ© volontairement entretenue. Si les animaux ne parlent pas, leur conscience nΓ©anmoins s’Γ©veille et s’Γ©largit, peu Γ peu. Citons ce petit miroir adoptΓ© par un lΓ©murien qui Β« se Β» regarde dedans, grimace sans que l’on puisse trancher sur une rΓ©elle prise de conscience de lui-mΓͺme. Ce motif se rΓ©pΓ©tera d’une faΓ§on diffΓ©rente et collective sur le splendide plan final dans l’eau-miroir.
Conscience Γ©galement en Γ©veil Β«existentielΒ», par le regard de l’autre, le besoin de l’autre, l’entraide, la comprΓ©hension de l’intΓ©rΓͺt d’une collaboration. Balbutiement de conscience(s) et invention d’un nouveau collectif, et par lΓ -mΓͺme d’une proto-politique. Par son naturalisme ornΓ© de moments fantasmatogoriques (sublime et triste sΓ©quence cΓ©leste), sans une once de miΓ¨vrerie, Flow transporte et interroge.
Une bande son parfaite, des images somptueuses (en dΓ©pit de dΓ©fauts d’animation, colorimΓ©trie instable et taches mouvantes sur le corps et contours des animaux), des scΓ¨nes virevoltantes. Une Arche de NoΓ© sans Dieu, sans homme et sans NoΓ©, un jardin d’Eden sans Eve ni Adam mais tout en puissance symbolique, avec d’Γ©vidents accents Β«myazakiensΒ».
Lors de ma sΓ©ance, les plus petits furent autant happΓ©s que les grands, par cette proposition aussi limpide que complexe, aux multiples niveaux de lecture. Du divertissement, de la beautΓ©, un poil d’humour, de l’Γ©motion, de l’intelligence. Merci pour ce surprenant bijou, auquel le titre d’oeuvre d’art peut Γͺtre attribuΓ© sans peine, et qui reste bien ancrΓ© en nous aprΓ¨s sa dΓ©couverte ! Mathieu Labrouche (Capsules cinΓ©philes)
CrΓ©dit photo: Copyright UFO Distribution
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